Le syndrome du “quoi” chez les medtechs : quand l’innovation oublie son go-to-market
Comment les medtechs peuvent réussir leur go-to-market : passer du produit à une véritable offre grâce au marketing stratégique.
Depuis des années que j’accompagne les medtechs, je constate une erreur stratégique récurrente : la focalisation quasi exclusive sur le produit. Le « quoi ». La fonctionnalité, le dispositif, le capteur, l’algorithme, la donnée. Beaucoup sont persuadés que la supériorité technologique suffira à convaincre le marché.
Mais une innovation, même brillante, ne crée pas un marché par sa seule existence. Et ce n’est pas parce qu’un produit fonctionne qu’il devient une offre.
La différence entre les deux, c’est précisément le go-to-market.
Qu’est-ce que le go-to-market ?
Le go-to-market (GTM) est la stratégie qui permet à une innovation d’atterrir dans la réalité : comment elle trouve ses premiers utilisateurs, comment elle devient une solution adoptée, recommandée, financée. Le GTM organise l’accès au marché, pas la visibilité d’un produit, et repose sur l’articulation cohérente de trois éléments :
- À qui s’adresse-t-on ?
- Quelle valeur perçue propose-t-on ?
- Comment organise-t-on l’accès, la preuve, la distribution et l’adoption ?
Et c’est ici qu’intervient un acteur essentiel… trop souvent appelé trop tard : le marketing.
Marketing : architecte, pas haut-parleur
Dans de nombreuses medtechs, le marketing est perçu comme une fonction tactique, chargée de « faire connaître » une fois le produit finalisé. Résultat : on met en place des actions de communication, on produit des contenus, on participe à des salons, on investit dans des campagnes.
Mais on fait du bruit autour d’un produit, pas autour d’une offre.
Le marketing, le vrai, n’est pas celui qui amplifie. Il est celui qui structure :
- Il qualifie les cibles et segmente les marchés,
- Il analyse les usages, les freins, les incentives,
- Il définit le positionnement et la proposition de valeur,
- Il formalise les preuves attendues,
- Il construit le récit et l’expérience,
- Il transforme une technologie en bénéfice concret.
Autrement dit : il prépare le go-to-market.
Sans marketing stratégique en amont, il n’y a pas de marché. Il n’y a qu’une solution technique qui cherche à exister.
Le point aveugle des medtechs
Trop d’entreprises de santé confondent : avoir un produit et être prêt à le vendre.
Elles considèrent que le marketing intervient après le développement, lorsque tout est figé. C’est pourtant l’inverse : le marketing est ce qui évite de développer une solution que personne n’attend, ou d’arriver avec un discours que personne ne comprend.
Un go-to-market solide ne s’ajoute pas à l’innovation. Il se co-construit avec elle. L’enjeu n’est pas de communiquer. L’enjeu est d’atterrir.
On ne réussit pas en santé en parlant plus fort que les autres. On réussit en parlant juste, à la bonne cible, avec une valeur claire, une preuve tangibile et un modèle soutenable.
Alors que faire ?
- Intégrer le marketing stratégique dès le début de l’innovation,
- Arrêter de penser « produit » et commencer à penser « offre »,
- Investir autant dans l’accès au marché que dans le développement,
- Considérer le go-to-market comme un actif, pas comme une formalité.
Une medtech sans go-to-market n’est pas en retard : elle est à l’arrêt, quelle que soit la qualité de sa technologie.
Ce n’est pas le meilleur produit qui gagne. C’est celui qui a été pensé pour quelqu’un, pour quelque chose, et qui dispose du chemin pour y arriver.
Dans la santé, nous n’avons pas besoin de dispositifs de plus. Nous avons besoin d’offres qui changent réellement les pratiques.
C’était le regard d’Aude.
