Aptitude à l’utilisation et retour sur investissement : un pari gagnant pour les dispositifs médicaux ?

Longtemps considérée comme optionnelle et coûteuse, l’aptitude à l’utilisation (ou usability) est aujourd’hui un prérequis réglementaire pour la mise sur le marché des dispositifs médicaux.

Encadrée par la norme EN 62366-1 en Europe et exigée par la FDA aux États-Unis, elle impose aux fabricants de démontrer que leurs dispositifs sont compréhensibles, sûrs et utilisables en conditions réelles.

Mais au-delà de la conformité, l’aptitude à l’utilisation est un investissement stratégique. De plus en plus de données montrent son impact économique direct, notamment dans trois domaines majeurs :

  • La réduction des coûts de développement,
  • La diminution des rappels produits,
  • Et l’accélération du time-to-market.

Réduction des coûts de développement : éviter les modifications tardives

Intégrer des études utilisateurs en amont du développement permet d’identifier très tôt des problèmes d’usage qui, non détectés, nécessiteraient des retouches coûteuses en fin de projet.

Des évaluations formatives (tests utilisateurs, audit expert, focus group) permettent :

  • D’éliminer des fonctionnalités inutiles ou mal conçues,
  • De mieux cibler les priorités de développement,
  • De prévenir les erreurs de conception/d’ergonomie qui pourraient engendrer des retouches coûteuses une fois le développement terminé.

Comme le souligne une étude publiée dans Medical Device & Diagnostic Industry, chaque itération corrective en phase finale coûte jusqu’à 10 fois plus cher qu’une correction en amont.

Les coûts liés à ces études sont donc nettement moins importants que les coûts qui pourraient survenir en cas de nécessité de modifier le produit en phase finale.

Diminution des rappels produits : prévenir plutôt que corriger

Selon un rapport de la FDA, entre 2010 et 2012, 36% des rappels de dispositifs médicaux aux États-Unis étaient liés à des erreurs de conception affectant l’usage du dispositif (mauvais affichage, alarme non détectée, mauvais guidage, etc.).

Traduction de la légende en français : Conception, contrôle des modifications, contrôle des procédés, Matériau/composant, emballage/étiquetage.

Parmi ces rappels liés à la conception, on retrouve :

  • Le rappel d’un logiciel car l’interface pouvait prêter à confusion concernant le côté du cerveau du patient
  • Le rappel d’un glucomètre car la décimale séparant deux chiffres était trop petite et n’était pas vu par certains patients

Et ces deux exemples ne sont qu’une infime proportion des rappels liés à des défauts de conception.

À titre d’exemple, certains coûts associés aux rappels de produits ont été documentés :

  • Un auto-injecteur mal évalué a conduit à la mise au rebut de 2 millions d’unités, avec plus de 500 000 dollars de dépensés dans des études de facteurs humains, et un produit jamais commercialisé.
  • En 2015, un rappel de produit majeur a coûté 600 millions de dollars à son fabricant.

Même si le contexte réglementaire et juridique est différent en Europe, ces exemples rappellent qu’un mauvais usage peut avoir des conséquences industrielles majeures.

Et ce type d’erreur est précisément ce que l’aptitude à l’utilisation permet d’anticiper, à condition de l’intégrer tout au long du cycle de développement, et non de la repousser au moment de la validation finale.

Accélération du time-to-market : un dossier plus robuste, une adoption plus rapide

On l’oublie souvent, mais un bon processus d’aptitude à l’utilisation :

  • Renforce le dossier de marquage CE, grâce à une démonstration claire de la sécurité d’utilisation,
  • Facilite l’adoption par les utilisateurs, grâce à une interface plus intuitive et répondant à leurs besoins.

Des estimations issues de retours industriels évoquent un retour sur investissement pouvant atteindre 10:1 voire plus dans certains cas, lorsque l’usability est intégrée dès les premières phases du développement. Même après actualisation financière, le gain reste significatif.

Et surtout : chaque mois gagné sur la mise sur le marché, c’est un mois de revenus supplémentaires et un avantage compétitif renforcé.

L’aptitude à l’utilisation : un investissement à impact multiple

Loin d’être un simple passage obligé pour “cocher la case CE/FDA”, l’aptitude à l’utilisation permet de :

  • Réduire les coûts de développement, en évitant les modifications tardives,
  • Réduire les risques industriels, en limitant les erreurs d’usage et les rappels,
  • Accélérer la mise sur le marché, en facilitant la validation réglementaire et l’adoption terrain.

Pour les fabricants qui cherchent à concilier conformité, efficacité et performance économique, l’aptitude à l’utilisation n’est donc pas un coût inutile mais une opportunité.

Amandine Broussier et Ilona Guiraud

Amandine, spécialisée en aptitude à l’utilisation, veille réglementaire et gestion de projets dans le domaine des dispositifs médicaux. Ilona, UX designer et researcher, forte d’une expérience approfondie dans l’application des exigences normatives au design de produit. Leur collaboration repose sur une conviction partagée : l’aptitude à l’utilisation est un levier central – trop souvent négligé – pour garantir la sécurité, la compréhension et l’efficacité des dispositifs médicaux. En combinant expertise réglementaire et design centré utilisateur, Usarea propose un accompagnement sur mesure, rigoureux et humain, au cœur même du processus de développement. L’objectif : concevoir des dispositifs à la fois intuitifs, sûrs et conformes, sans freiner l’innovation.

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