Performance, IA et sécurité : Les atouts de la plateforme Enovacom. Entretien avec Quentin Vallet et le Dr Gérald Rigou
La téléradiologie s'est imposée comme une réponse essentielle aux défis de l'accès aux soins en imagerie médicale en France. Face à la crise démographique des radiologues, elle garantit la continuité des services, de jour comme de nuit, et permet la prise en charge d'urgences vitales sur l'ensemble du territoire. Au-delà de l'expertise médicale, la performance, la fiabilité et l’efficacité des plateformes technologiques sont déterminantes.

La téléradiologie s’est imposée comme une réponse essentielle aux défis de l’accès aux soins en imagerie médicale en France. Face à la crise démographique des radiologues, elle garantit la continuité des services, de jour comme de nuit, et permet la prise en charge d’urgences vitales sur l’ensemble du territoire. Au-delà de l’expertise médicale, la performance, la fiabilité et l’efficacité des plateformes technologiques sont déterminantes. Pour décrypter le rôle central de ces outils, notamment celui développé par Enovacom, et leur impact sur la pratique quotidienne et la prise en charge des patients, Medtech France a organisé une interview croisée avec le Docteur Gérald Rigou, radiologue libéral, président de TMF Santé (Télémédecins de France) et Monsieur Quentin Vallet, Directeur de la Business Line Téléradiologie chez Enovacom.
Medtech France : Docteur Rigou, Monsieur Vallet, pourriez-vous décrire brièvement vos rôles respectifs dans le domaine de la téléradiologie ?
Dr. Gérald Rigou :. Mon rôle principal est d’assurer la direction médicale de nos prestations de téléradiologie, y compris l’organisation et le suivi des procédures qualité. Nous sommes un réseau de plus de 200 radiologues partenaires.
Monsieur Quentin Vallet : Notre rôle est de mettre en place l’ensemble du workflow technique nécessaire à la téléradiologie, connectant les établissements demandeurs à nos partenaires radiologues comme TMF Santé. Je m’assure que notre outil de travail soit performant pour l’interprétation à distance et réponde aux besoins des radiologues et des établissements.
M.F : Comment la plateforme de téléradiologie d’Enovacom répond-elle aux défis techniques spécifiques de cet exercice à distance ?
Q.V : Notre priorité en tant qu’éditeur technique est d’intégrer au workflow les outils qui répondent précisément aux besoins des radiologues. L’un des principaux enjeux est de fournir un outil véritablement adapté à la pratique à distance, qui diffère de l’exercice en présentiel. Cela implique d’intégrer des outils de post-traitement d’images modernes, comme ceux nécessaires pour l’analyse des perfusions cérébrales dans les AVC aigus, via des partenariats spécialisés.
Le deuxième axe majeur est de proposer un workflow le plus automatisé et intégré possible. La clé est l’interopérabilité avec les outils existants des services d’imagerie, comme les RIS (Radiology Information System), qui varient d’un établissement à l’autre. Enovacom a une expertise historique dans l’interopérabilité, ce qui nous permet de garantir une communication fluide entre notre brique de téléradiologie chez le client et son système d’information. L’établissement peut ainsi utiliser un seul outil métier intégré.
La plateforme est un service SaaS sécurisé et intégré aux SI. Elle permet la visualisation en temps réel des images produites dans les établissements, crucial pour une prise en charge rapide, notamment en urgence. L’objectif est de donner au téléradiologue l’impression d’être présent sur place grâce à des canaux de communication fiables.
Dr. G.R : L’adaptation de l’outil à l’exercice à distance est fondamentale. Nous avons besoin de fonctionnalités spécifiques pour gérer un “télédossier”, qui diffère d’une prise en charge en cabinet ou à l’hôpital. Des outils de communication efficaces avec les équipes sur place sont indispensables. La plateforme Enovacom offre un workflow technique adapté qui permet également des processus clés pour nous, comme la télé-expertise et la relecture systématique des interprétations par nos experts, garantissant la qualité et la sécurité.
Elle propose des formulaires structurés adaptés aux différents types d’examens (scanner, IRM, etc.), l’accès aux examens antérieurs pour comparaison, et permet de réaliser les comptes-rendus d’interprétation pour tout type d’examens. Le workflow peut être personnalisé (multi-correspondants, multi-étapes).
Grâce aux workflows mis en place avec Enovacom, nous pouvons visualiser en temps réel les images produites dans les établissements. Nous disposons d’outils qui nous permettent de répondre de manière rapide et qualitative, notamment en ce qui concerne les protocoles de thrombolyse dans la prise en charge des AVC. Prenons un exemple concret : un patient victime d’un AVC arrive à l’hôpital et bénéficie immédiatement d’une IRM. Dans le même temps, le radiologue TMF, grâce aux outils d’Enovacom, visualise les images et peut échanger avec le neurologue pour décider de l’opportunité ou non d’une thrombolyse. Cette immédiateté, comparable à la présence physique du radiologue, est assurée par des experts en neuroradiologie, ce qui constitue un avantage considérable.
M.F : Vous avez mentionné l’intégration de l’intelligence artificielle. Quelles fonctionnalités IA sont concrètement disponibles via la plateforme ?
Dr. G.R : Les solutions d’IA sont aujourd’hui multiples et en constante évolution. Nous avons fait le choix de débuter avec une solution d’IA à visée diagnostique, qui s’applique à la radiographie traumatique, à la télémétrie (réalisation de mesures orthopédiques) et au calcul de l’âge osseux. Concernant l’âge osseux, cette fonctionnalité, fournie par la société Gleamer, permet d’évaluer la maturation osseuse chez les enfants de manière rapide et fiable. Alors qu’une évaluation manuelle peut prendre plusieurs minutes en comparant les clichés à des atlas, l’IA réalise cette tâche en quelques secondes, avec une grande précision. Ceci est particulièrement utile en cas de suspicion de pathologies endocrinologiques entraînant une discordance entre l’âge civil et l’âge osseux.
De même, pour la télémétrie, l’IA permet d’obtenir des mesures extrêmement fiables et d’améliorer la qualité des comptes rendus transmis aux établissements.
Enfin, et c’est un module particulièrement intéressant de la société française Gleamer, nous utilisons BoneView, une IA spécialisée dans la détection de fractures sur les clichés radiographiques, quel que soit l’âge du patient. Ce qui est important de souligner, c’est que cette IA ne se contente pas de signaler la présence d’une fracture, car le radiologue l’aurait déjà identifiée. Sa véritable valeur ajoutée réside dans son excellente valeur prédictive négative. Sur sa dernière version, cette valeur est supérieure à 99%. Cela signifie qu’un cliché que l’IA considère comme exempt de fracture l’est très probablement. Bien sûr, une vérification humaine par le radiologue reste indispensable, mais cette fiabilité permet d’accélérer considérablement le workflow. Sur un grand nombre de clichés ne présentant pas de fracture, le radiologue peut ainsi valider rapidement la normalité et consacrer plus de temps et d’attention aux cas pathologiques, améliorant ainsi la qualité de la description des fractures et la communication avec les équipes sur place.
Q.V : Effectivement, nous collaborons avec Gleamer depuis plusieurs années pour intégrer de manière fluide les résultats générés par leurs algorithmes dans notre viewer diagnostique. L’objectif est de faciliter le travail du radiologue en lui donnant un accès rapide aux images d’intérêt et en l’assistant dans l’interprétation des résultats de l’IA. Actuellement, les comptes rendus sont toujours rédigés et signés par les radiologues. La stratégie en cours est d’étudier comment nous pourrions intégrer automatiquement ces résultats dans le compte rendu, afin que le radiologue dispose d’un certain nombre d’informations préremplies qu’il pourra ensuite valider ou nuancer. Cependant, il est crucial de souligner que, même si nous parvenions à automatiser la génération de comptes rendus, le workflow intégrera toujours une étape de signature manuelle par le radiologue, qui demeure le garant de la qualité et de la pertinence du diagnostic.
M.F : Quel est l’impact de ces outils et de l’IA sur votre pratique quotidienne, Docteur Rigou ?
Dr. G.R : L’IA accélère notre workflow, notamment sur les clichés normaux, ce qui nous fait gagner un temps précieux. Ce temps gagné nous permet de nous consacrer davantage aux cas complexes, d’approfondir notre analyse, et d’améliorer nos comptes rendus et notre communication avec les cliniciens. L’IA est un outil d’aide à la décision et d’optimisation du temps de travail, mais elle ne remplace en aucun cas notre expertise.
M.F : Comment garantissez-vous la sécurité des données médicales dans ce cadre technologique avancé ?
Q.V : La sécurité et la confidentialité des données de santé sont une priorité absolue pour Enovacom. Notre approche est hybride. Nous installons une brique logicielle chez le client, au sein de son infrastructure sécurisée, qui va récupérer les données d’imagerie. Ces données transitent ensuite vers un hébergement certifié HDS (Hébergeur de Données de Santé). Enovacom est d’ailleurs certifié HDS. Actuellement, notre hébergeur est OVH, avec qui nous avons un partenariat historique. Nous utilisons l’environnement “Haute Sécurité” d’OVH. Un canal sécurisé est mis en place entre l’établissement de santé et l’hébergement OVH. Il s’agit d’un réseau hautement sécurisé, spécifiquement conçu pour le transit de données de santé sensibles. Ce canal est basé sur une technologie certifiée par l’ANSSI (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information), garantissant un niveau de sécurité maximal. Nous mettons tout en œuvre pour assurer un cadre le plus fiable possible, fort de notre longue expérience en télé-imagerie.
M.F : Docteur Rigou, face aux inquiétudes parfois exprimées sur le remplacement des radiologues par l’IA, quelle est votre vision du rôle du radiologue dans ce nouveau paradigme ?
Dr. Gérald Rigou : Je tiens à être très clair sur ce point : il n’y a aucune inquiétude de notre part quant à un remplacement des radiologues par l’IA. Il existe beaucoup de fantasmes autour de l’IA, comme c’est souvent le cas avec les nouvelles technologies. On a parfois l’impression que l’IA va tout faire et tout remplacer de manière impeccable. Or, nous constatons tous les jours les limites de l’IA, que ce soit dans le traitement du langage naturel (avec des “hallucinations” fréquentes) ou en imagerie médicale. Je parlais de la solution de Gleamer, qui fonctionne très bien pour la traumatologie, mais elle reste extrêmement limitée et ne permet pas de réaliser un bilan rhumatologique complet. Aujourd’hui, aucune IA n’est capable de caractériser finement des pathologies complexes. L’IA peut aider à la détection d’anomalies, mais pas à leur caractérisation précise. Il n’existe pas d'”IA médecin” à l’heure actuelle.
L’IA est un outil précieux pour aller plus vite sur les cas simples et pour limiter la charge mentale du radiologue, lui permettant de se concentrer sur les cas plus complexes. Si, à l’avenir, l’IA venait à développer des capacités de caractérisation plus poussées, cela pourrait permettre de libérer encore plus de compétences médicales au service des patients. Cependant, je ne crois pas que, dans un avenir proche, des sociétés d’assurance pourraient se baser uniquement sur des diagnostics d’IA pour prendre des décisions. Il faudra toujours un médecin pour valider le diagnostic, avec le recul et l’expertise nécessaires. Et n’oublions pas qu’il faudra toujours des structures possédant les équipements d’imagerie et des professionnels de santé pour les faire fonctionner et interpréter les images.
Q.V: L’analogie avec la voiture autonome est pertinente. On en parle beaucoup, mais il y a encore un long chemin à parcourir avant de pouvoir confier sa sécurité à une machine sans supervision humaine.
Dr. G.R : Je pense qu’aucun patient n’aurait confiance en une IA pour la surveillance de son cancer, tout comme aucun voyageur ne confierait sa vie à une IA aux commandes d’un avion.
Medtech France : Quels sont vos projets futurs concernant l’évolution de la plateforme technique ?
Dr. G.R : L’amélioration continue de la plateforme technique est une priorité. Nous travaillons notamment sur le compte rendu structuré.
Q.V : Le compte rendu structuré est un chantier majeur. Il vise à réduire la charge mentale des radiologues et optimiser leur temps médical. Notre rôle est de mettre les outils à disposition pour garantir la qualité dans ce domaine, en nous adaptant constamment aux besoins spécifiques de la téléradiologie et en garantissant la fiabilité de nos solutions. Nous avons une trentaine de développeurs dédiés à l’évolution, la fiabilité et la sécurité de notre workflow téléradiologie.
M.F : Un mot pour conclure ?
Dr. Gérald Rigou : Pour TMF Santé et Enovacom, notre collaboration historique en téléradiologie permet d’allier qualité médicale et organisation technique au service des patients.
Monsieur Quentin Vallet : Nos relations sont historiques, et l’engagement des équipes, tant chez Enovacom que chez TMF Santé, est très fort. Notre motivation première est d’accompagner au mieux les établissements de santé et d’améliorer les chances des patients en leur offrant une ressource médicale de qualité, même dans les zones où l’accès aux spécialistes est difficile. C’est ce qui nous anime au quotidien.